Eldorado

de Laurent Gaudé

Quatrième de couverture:

Gardien de la citadelle Europe, le commandant Piracci navigue depuis vingt ans au large des côtes italiennes, afin d'intercepter les embarcations des émigrants clandestins. Mais plusieurs événements viennent ébranler sa foi en sa mission.
Dans le même temps, au Soudan, deux frères (bientôt séparés par le destin) s'apprêtent à entreprendre le dangereux voyage vers le continent de leurs rêves, l'Eldorado européen...


Mon avis:

J'ai beaucoup apprécié la lecture de ce roman. D'abord parce que j'ai retrouvé la plume de Gaudé, son écriture majestueuse qui arrive à faire naître une multitude de voix, de cris, d'émotions. Le sujet aussi. Intemporel, celui de l'exil, de la fuite, de l'arrachement. Entre ces pages on découvre ou on retrouve l'appel de l'Eldorado.

Le commandant Piracci voit sa vie basculer quand il croise une femme qui l'a reconnu. Une femme à qui il a sauvé la vie. Devant sa détermination, il prend conscience du vide qui l'habite. J'ai aimé la façon dont l'auteur décrit son combat sur les mers, combat pour sauver des vies abandonnées en pleine mer par des passeurs peu scrupuleux:
"Au fond, ces histoires d'émigration et de frontières n'étaient rien. Ce n'était pas cela qui lui faisait quitter le port pour aller piocher dans la nuit la plus noire. A cet instant précis, il n'y avait plus de bâtiment de la marine militaire et de mission d'interception. Il n'y avait plus d'Italie ou de Lybie. Il y avait un bateau qui en cherchait un autre. Des hommes partaient sauver d'autres hommes, par une sorte de fraternité sourde. Parce qu'on ne laisse pas la mer manger les bateaux. On ne laisse pas la mer se refermer sur des vies sans tenter de les retrouver."
Mais cela n'a plus de sens pour lui. Dans le regard de ces hommes et femmes, le même rêve, le même espoir. La même détermination pour atteindre ce but. Cet Eldorado.
"L'herbe sera grasse et les arbres chargés de fruits. De l'or coulera au fond des ruisseaux, et des carrières de diamants à ciel ouvert réverbèreront les rayons de soleil. Les forêts frémiront de gibier et les lacs seront poissonneux. Tout sera doux là-bas. Et la vie passera comme une caresse. L'Eldorado commandant, ils l'avaient au fond des yeux. Ils l'ont voulu jusqu'à ce que leur embarcation se retourne. En cela, ils ont été plus riche que vous et moi. Nous avons le fond de l'oeil sec, nous autres. Et nos vies sont lentes."
J'ai aussi apprécié son lien avec son ami Angelo. Malgré tout, sa vie n'a plus de sens. Il veut s'affranchir. Quitter tout.
"Il était en route. Et il avait décidé d'aller jusqu'au bout. Il n'était plus personne. Il se sentait heureux. Comme il était doux de n'être rien. Rien d'autre qu'un homme de plus, un pauvre homme de plus sur la route de l'Eldorado."
En miroir avec notre commandant qui quitte l'Europe, un jeune homme fuit le Soudan. Malgré ce qui brille au fond des yeux des émigrants, Gaudé nous faut entendre la souffrance et la douleur qui accompagnent chacun de ces voyages vers un monde tant espéré.
"Je me suis trompé. aucune frontière n'est facile à franchir. Il faut forcément abandonner quelque chose derrière soi. Nous avons cru pouvoir passer sans sentir la moindre difficulté, mais il faut s'arracher la peau pour quitter son pays. Et qu'il n'y ait ni fils barbelés ni poste frontière n'y change rien. J'ai laissé mon frère derrière moi, comme une chaussure que l'on perdants la course. Aucune frontière vous laisse passer sereinement. Elles blessent toutes."
La rencontre entre Soleman et Piracci est pleine de poésie : croisement des croyances et de l'espoir avec la raison et les choix que nous faisons. Ce rôle d'une ombre de Massambalo sied bien à  notre commandant.

Un beau roman.

J'ai lu ce livre en lecture commune avec unchocolatdansmonroman !


Commentaires

  1. contente que tu aies aimé. Ce qui me fascine c'est cette faculté qu'il a à ancrer son récit dans la réalité tout en laissant une part de magie

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    1. oui, une magie présent dans toutes ces oeuvres, quelque soit le thème ou le ton.

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  2. J'aime beaucoup cet auteur mais je n'ai pas lu celui-ci, je note :) !

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  3. Je ne connais pas la plume de l'auteur. J'ai vu son nom une ou deux fois, par ci par là. L'écriture a l'air très poétique!
    Bisous Piplo, c'est toujours un plaisir d'échanger avec toi malgré le fait que je ne passe pas aussi souvent que je le voudrais...

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    1. Il faut que tu le découvres, il y a de la magie dans ses mots.
      Pour moi c'est pareil, je suis ravie de nos échanges même s'ils sont moins fréquents que je ne sale souhaiterais! Bisous!

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